« L’Afrique nouvel eldorado des investisseurs » (Le Monde), la « burgeoning bourgeoisie » (The Economist)... L’image du continent africain a bien changé en quelques années, passant du « continent du malheur » à celui de la nouvelle frontière et de l’émergence. Saisir ces mutations est ce qui rassemble depuis 2008 un photographe, Joan Bardeletti, et une équipe de chercheurs de Sciences Po Bordeaux / Laboratoire « Les Afriques dans le monde », tous engagés dans l’interprétation de ce qui est présenté comme l’un des faits marquants dans tous les pays émergents et notamment sur le continent africain : l’émergence des classes moyennes.
Alors qu’en France, on continue à entendre trop régulièrement des discours teintés d’exotisme, de folklorisme sur le continent africain, cette exposition donne un nouvel éclairage sur les très nombreux « invisibles » porteurs de ces nouvelles dynamiques sociales, économiques et politiques, que les médias définissent comme des « classes moyennes ».
L’urbanisation massive, la pression démographique, la jeunesse de la population, l’accroissement mécanique de la consommation interne, la croissance économique continue des quinze dernières années, la disparition progressive des générations des Indépendances et leur remplacement par de nouvelles vagues mieux formées et décomplexées par rapport
à l’Occident, accélèrent et témoignent des dynamiques sociales et économiques en cours sur le continent.
L’association de la photographie et de la science politique, dans un même projet, est une aventure ancienne mais qui demeure encore aujourd’hui relativement rare. Elle permet de dévoiler en jouant sur l’esthétique, sur l’émotion, sur la méthode et sur la raison scientifique, le quotidien de la vie ordinaire et de saisir en quelques images contextualisées, des mutations sociales et politiques les plus triviales, les plus violentes ou les plus choquantes. Elle permet d’enrichir la connaissance en multipliant les perspectives et les regards.