« La fin est dans le commencement et cependant on continue ».
Depuis l’automne 2014, Salia Sanou et les danseurs du Centre de Développement Chorégraphique La Termitière conduisent des ateliers de danse au sein du camp de réfugiés maliens de Sag-Nioniogo et de Mentao au Burkina Faso, dans le cadre du programme « Refugees on the moove ». Ces réfugiés sont principalement issus des déplacements de populations générés par la guerre au Mali.
Cette expérience humaine offre au chorégraphe un espace de liberté pour l’imagination et la pensée. Dans cette création, inspirée par ces ateliers, Salia Sanou s’interroge sur l’exil qui frappe les « étranges étrangers » d’un monde globalisé, et l’exil que chacun porte en soi. L’exil comme espace de souffrance et de renoncement mais aussi de reconstruction.
Sans illustrer ce que peuvent être ces situations, Désir d’horizons s’articule sur le travail de corps d’hommes et de femmes qui réapprennent à vivre dans des espaces d’enfermement, sur l’énergie des femmes qui réinventent chaque jour un peu de vie ou sur l’effondrement des hommes.
Dix interprètes témoignent à travers leurs corps de l’état du monde. Le texte de Nancy Huston Limbes / Limbo, Un hommage à Samuel Beckett résonne comme une partition indissociable de la danse et de l’espace chorégraphique. La dimension de solitude et celle de l’altérité se croisent pour illustrer à la fois l’obscur et la lumière. Nourri d’états de corps tels que l’attente, la tension, la lenteur, mais aussi l’énergie, la vitalité, Salia Sanou explore les mémoires individuelles et collectives des tragédies contemporaines. Au-delà du propos grave, il interroge la dimension d’exil intérieur que chacun porte en soi, comme une parcelle inaltérable de force, de lutte et de désir.
« Je peux dire que « Du Désir d’horizons » n’est pas un spectacle sur les camps de réfugiés à proprement parler, mon propos n’a rien du documentaire ni du témoignage. Je laisse ce travail à la presse et aux réseaux sociaux qui relatent quotidiennement les horreurs que vivent les personnes déplacées et violentées. Il s’agit d’une composition où le vocabulaire chorégraphique laisse la place au sens et à la réflexion sur la situation délicate des réfugiés et sa résonance en chacun de nous.
Le découpage que j’ai opéré dans le texte de Nancy Huston se veut comme une infime partition posant ainsi des mots sur mon indicible... »
Salia Sanou
Né en 1969, Sania Sanou, danseur et chorégraphe se forme auprès de Drissa Sanon, Irène Tassembedo ou Germaine Acogny. En 1993, il intègre la compagnie de Mathilde Monnier au Centre chorégraphique national de Montpellier, participe alors aux différentes créations et rencontre Seydou Boro. Ensemble, ils fondent la compagnie Salia nï Seydou et créent leur premier spectacle Le siècle des fous. Suivent alors plusieurs chorégraphies présentées à Limoges : L’Appel, Un pas de côté ou Poussières de sang.
es deux chorégraphes dirigent ensemble depuis 2006 la biennale Dialogue de corps et le Centre de développement chorégraphique La Termitière, à Ouagadougou.
En 2011, Salia Sanou crée sa propre compagnie Mouvements Perpétuels, implantée à Montpellier. Il crée Dambë, le projet participatif Souvenir de la rue Princesse à Limoges en 2011 et Au-delà des frontières. Dernièrement, il a créé Clameur des arènes avec cinq lutteurs sénégalais, trois danseurs du Burkina Faso et quatre musiciens chanteurs mettant à nouveau en valeur les échanges entre différentes cultures.
Salia Sanou a été nommé Officier des Art et des Lettres en 2008 par le Ministère de la Culture français et a reçu, avec Seydou Boro, le trophée Culturesfrance des Créateurs 2007. Il a été également élu Artiste de l’année 2003 par l’Organisation Internationale de la Francophonie.
Refugees on the Move
Danser pour oublier, pour espérer, pour exister. Depuis plusieurs années, la fondation African Artist for Development (AAD), en partenariat avec le Haut commissariat aux réfugiés (HCR), utilise la danse comme moyen de reconstruction psychologique des populations réfugiées sur le continent africain. Le programme « Refugees on the move » est initié en 2009. Il porte sur la dimension de la danse comme support de médiation sociale par l’organisation d’ateliers au sein des camps de réfugiés de 10 pays d’Afrique Sub-saharienne, les objectifs étant de réduire la violence intra et intercommunautaire, de redonner estime de soi aux réfugiés et d’accroître le dialogue avec l’extérieur.
L’ensemble du programme s’articule autour de trois axes : des ateliers de danse quotidiens lors de différentes sessions, sur une période d’un an pour chaque pays, menés sous la direction d’un chorégraphe originaire du pays concerné et d’une équipe artistique ; des messages de sensibilisation introduits par une pratique collective de contact, partage, transmission de messages socio-éducatifs portant sur la réalité quotidienne des camps ; le soutien à l’émergence de nouvelles troupes propres aux camps, repérées par les équipes artistiques parmi les réfugiés.
Nancy Huston
Née à Calgary au Canada, sa carrière de romancière commence en 1981 avec Les Variations Goldberg publié chez Actes Sud. Douze ans plus tard, elle revient à sa langue natale en écrivant Cantique des plaines. Le roman est refusé par les éditeurs anglophones et Nancy Huston se résigne à le traduire en français pour qu’il soit publié. Depuis, Nancy Huston écrit en anglais et en français.
Elle est l’auteur de nombreux romans et essais publiés chez Actes Sud et chez Leméac, parmi lesquels Instruments des ténèbres (1996 ; prix Goncourt des lycéens et prix du Livre Inter), L’Empreinte de l’ange (1998 ; grand prix des Lectrices de Elle), Lignes de faille (2006 ; prix Femina), Infrarouge (2010), Reflets dans un œil d’homme (2012), Danse noire (2013) et Bad Girl (2014).