ELBADAWI Soeuf


Comores Origine de la bourse :

Dates de résidence : en janvier , mi mai et juin 2010
Journaliste, comédien, metteur en scène, auteur de fictions.

Soeuf Elbadawi est né en 1970 à Moroni, la capitale des Comores. Journaliste, il travaille à Radio Comores entre 1989 et 1992. À Paris ensuite, il collabore avec Radio France Internationale, pour laquelle il produit des magazines culturels durant une quinzaine d’années sur la littérature francophone, la musique ou sur l’immigration. Membre de la rédaction de la revue Africultures, il a également écrit un temps pour le compte de chronicart.com en France et pour le mensuel Kashkazi aux Comores.

Soeuf Elbadawi est à l’initiative, avec l’écrivain malgache Jean-Luc Raharimanana, des Dernières Nouvelles de la Françafrique, recueil de nouvelles paru en 2003 et à travers lequel treize auteurs d’origine africaine et indianocéane, dont lui-même, questionnent les relations ambiguës entretenues par la France avec ses anciennes colonies.

De retour dans son pays depuis 2006, Soeuf Elbadawi a enseigné à l’université des Comores, animé un laboratoire de recherche sur le spectacle vivant, le laboresvik, et s’est occupé du "Komor4 Festival", avant de fonder sa compagnie de théâtre, O Mcezo* Cie, en novembre 2008. Producteur de disque pour le compte du label parisien Buda Musique, il est aussi directeur artistique de Washko Ink., structure de production culturelle et d’agitation citoyenne.

Soeuf Elbadawi partage son temps entre Paris et Moroni. Il est membre fondateur du collectif d’auteurs et critiques comoriens Djando la Waandzsihi.

Distinction
En mars 2014, Soeuf Elbadawi reçoit le Prix littéraire des lycéens, apprentis et stagiaires de la formation professionnelle en Ile-de-France pour son ouvrage Un dhikri pour nos morts. La rage entre les dents. Soeuf Elbadawi a adapté ce texte au théâtre il y a deux ans et l’a joué aux Comores, à la Réunion et en France. Il s’en est aussi inspiré pour nourrir sa proposition scénique, Obsession de lune idumbio IV, programmée par les Francophonies en Limousin, la Maison de l’Outre-Mer à Nantes et le Festival comoriens des arts contemporains (FACC) à Moroni

mise à jour mars 2014
photo Patrick Fabre, Limoges, septembre 2010.

Créations de l'auteur

Bibliographie

Shungu, un festin de lettres, éditions Komedit, octobre 2014, ouvrage collectif rassemblant des textes de huit auteurs francophones (Julie Gilbert, Marie Fourquet, Marcelle Dubois, Raharimanana, Marc-Antoine Cyr, Bibish Marie-Louise Mumbu, Papy Maurice Mbwiti, Soeuf Elbadawi), publié suite à la Soirée des manifestes organisée à Limoges lors de la 30e édition des Francophonies en Limousin.

Un dhikri pour nos morts. La rage entre les dents, théâtre, éditions Vents d’ailleurs, mars 2013 ; Prix littéraire des lycéens, apprentis et stagiaires de la formation professionnelle en Ile-de-France, mars 2014.
Un vent poétique puissant souffle dans ce texte aussi dense qu’intense, maintes fois mis en scène. Une tragédie traduisant l’effondrement d’une histoire d’archipel. Où il est question du plus grand cimetière marin du monde, des enjeux géostratégiques de la France dans l’océan Indien, des droits bafoués d’un peuple du Sud encore sous tutelle, des choix politiques d’une île appelée Mayotte, de la sécurité de l’Europe et de la disparition annoncée d’un pays. ISBN : 978-2-36413-031-9 | 14 x 15 cm | 64 pages | 9 €

Fictions comoriennes, recueil de nouvelles, ouvrage collectif, Komedit, 2010.

Z is not dead, fiction courte, Riveneuve Continents, n° 10, 2009.

Moroni Blues, une rêverie à quatre, théâtre, éditions Bilk & Soul, Moroni, 2009.

Un poème pour ma mère, une rose entre les dents, poésie, Komedit, Moroni, 2008.

Nouvelles écritures comoriennes, collectif, Komedit, 2007.

Une suite à Moroni Blues, avec Rémi Carayol et Kamal Eddine Saindou, Éditions de la Lune, Levallois-Perret, 2007.

Moroni Blues/ Chap. II, poème-essai, éditions Bilk & Soul, 2007.

Nouvelles écritures comoriennes, recueil de textes, ouvrage collectif, Komedit, 2007.

Digressions sur ce que petite feuille n’est pas, Riveneuve Continents n°3, automne 2005.

Notes de Moustwafa S. sur la mort du citoyen Kader, dans Dernières Nouvelles de la Françafrique, recueil collectif, Editions Vents d’Ailleurs, La Roque d’Anthéron, 2003.

Maandzish n°3/ Petites histoires comoriennes, avec Isabelle Mohamed, Aboubacar Mchangama et Mohamed Ahmed-Chamanga, recueil de textes sur la situation politique de l’Archipel des Comores, Komedit, 2003.

Spectacles et mises en scène

2012
Un dhikri pour nos morts, conception, jeu et mise en jeu de Soeuf Elbadawi. Création à Paris (Espace Confluences, du 18 au 29 janvier 2012.
Conscience brisée, un homme, fils et petit-fils d’un peuple de lune, raconte, la rage entre les dents, le lent délitement de son archipel. Nous sommes aux Comores. Et ses semblables se noient par milliers sous les spotlights éteints du vaste monde. Au pied du mur - un mur dressé d’une main de maître sur un bras de mer d’à peine 70 km – l’homme égrène son chapelet au rythme des kwasa en naufrage, orchestrant ainsi le dhikri de la dernière illusion..

2011
Moroni Blues, conception, jeu et mise en jeu de Soeuf Elbadawi, avec le musicien Baco Mourchid. Création aux 28es Francophonies en Limousin (à Limoges et Bellac).

2009
La Fanfare des fous, spectacle sur la dépossession citoyenne, avec la compagnie O Mcezo*, tournée comorienne. Première création de la compagnie O Mcezo*. Tournée comorienne avec le soutien de la Fondation du Prince Claus, aux Pays-Bas.
Développe le gungu la mcezo au sein du laboresvik. Performance théâtrale, inspirée d’une tradition populaire comorienne, appelée « gungu ». Théâtre de rue.

Organise la première édition du Kiomcezo, rencontres artistiques à géométrie variable.

Moroni Blues/ Une rêverie à quatre. Reprise à la Réunion et tournée régionale dans l’Océan Indien. Répétitions à Madagascar et programmation à la Réunion, à Maurice, aux Comores. Avec le soutien de la Spedidam en France et du Fonds de coopération régional à la Réunion. Parution du texte aux éditions Bilk & Soul.

2008
Création de la compagnie O Mcezo* à Moroni. Pour un théâtre à vocation populaire et citoyenne.
Dirige un festival universitaire et pluridisciplinaire, sur la scène de l’alliance française de Moroni.
Ecrit et joue dans Moroni Blues/ Une rêverie à quatre. Création au Théâtre des Bambous scène conventionnée à la Réunion. Projet en coproduction avec les Bambous à Saint-Benoît, Washko Ink. à Moroni et BillKiss* à Paris. Mise en scène de Robin Frédéric.

2007
Hommage à Rûmi, spectacle de Titi Robin, Théâtre Gérard Philippe/festival Africolor, France.

Aller simple pour Moroni, lecture-performance autour de Moroni Blues/ chap. II à "La Baleine qui dit Vagues" à Marseille. Avec "Lectures du monde".

Participe à Lantouraz, Théâtre du Grand Marché, île de la Réunion.

Fonde le "Laboresvik", laboratoire de recherche en spectacle vivant, à l’université des Comores et présente des projets avec les étudiants sur le plateau de l’Alliance française de Moroni de 2007 à 2008.

2006
Abdel K., mise en espace avec les étudiants de la faculté de Lettres de l’Université des Comores. Spectacle sur l’assassinat d’un homme politique dans les années 1980, librement inspiré d’une nouvelle parue dans les Dernières nouvelles de la Françafrique. Représentation au Palais du Peuple, Moroni.

Collabore sur un chantier de rencontre et d’échange théâtral organisé par le Théâtre du Grand Marché (Saint-Denis, la Réunion) à Moroni. Avec la participation de la Compagnie L’Entreprise (Marseille, France).

2005
Piridjas le Magnifique, texte de commande pour "L’Œil du Cyclone", festival de théâtre du Grand Marché/ Centre Dramatique National, île de la Réunion.

Esprit de transhumance. Reprise au Théâtre de l’Opprimé à Paris.

Haïti d’île et d’exil. Reprise à Collectif 12, à Mantes La Jolie, en région parisienne, et à l’Institut Français de Naples.

2004
Joue dans Haïti d’île et d’exil. Au Théâtre International de Langue Française à Paris (TILF). Spectacle de Luc Clémentin. Egalement programmé à Beaubourg.

Esprit de transhumance au Théâtre de l’Opprimé à Paris. D’après les Testaments de transhumance de Saïndoune Ben Ali, poète comorien (éditions Komedit). Spectacle sur l’histoire politique des Comores, initialement créé au festival "Métissons", à Marseille, en 2003.

Films

Sirikali za mikowani : engarendo nda ? Parole citoyenne sur le processus de communalisation aux Comores. Production Washko Ink. Film ayant bénéficié de fonds européens (PCD). Durée : 28 mn, 2010.

Moroni ce long poème... Sur le repli communautaire, 22 mn, Washko Ink, 2008.

Moroni Undroni Mndroni, coréalisation avec Ahmed Jaffar. Washko Ink., 30 mn, 2006.

Musique

Chants de lune et d’espérance. Collectif Mwezi Waq. Buda Musique. 2012

Produit ali.amani/ chants soufis des Comores, album, musiques soufies, Buda Musique. Présentation de Ndzia, récital de musique soufie à l’alliance française de Moroni. 2009.

Crée Zaïnaba, spectacle de chants et danses traditionnelles, Komor4 Festival, à Moroni, avec le concours du Scout Ngome. Production également d’un récital de la chanteuse comorienne, programmé au festival Africolor et à la Comédie de Reims en 2006.

Zaïnaba/ Chants de femmes des Comores, album, Buda Musique, Paris, 2005.

Musiques traditionnelles des Comores, album, Buda Musique, Paris, 1999.

Exposition, installation, production sonore

Pays de lune, première étape de travail autour d’une installation en quatre volets, retraçant le destin politique d’un archipel déconstruit. Réflexion autour d’une obsession citoyenne, 2009-2010.

Crée djahazi lorosa swauti, laboratoire de recherche et d’expérimentation sonore à partir de la réalité comorienne, 2009.

Moroni Blues/ Chap. II, installation et performance, au festival du Film d’Afrique et des Îles, à la Réunion, 2006

Moroni Blues, exposition des premières images au Centre Culturel André Malraux au Bourget, en France. Dans le cadre du festival Africolor, 2004.

Autres informations

Soeuf Elbadawi et les Francophonies en Limousin

2010 (en janvier et de mi mai à juin) - Résidence à la Maison des auteurs.

2011 : Moroni Blues, conception, jeu et mise en jeu de Soeuf Elbadawi, avec le musicien Baco Mourchid. Création aux 28es Francophonies en Limousin (à Bellac et Limoges).

septembre 2012 : avec deux autres auteurs du collectif comorien Djando La Maandzishi, il participe aux rencontres des Collectifs d’auteurs organisées à l’occasion des 29es Francophonies en Limousin.

2013 : suite aux rencontres de 2012, il représente le collectif Djando La Maandzishi à La Soirée des manifestes (Les auteurs passent à l’acte !).

2014 :
9es Nouvelles Zébrures, 26 au 29 mars
Obsession de lune idumbio IV, texte et lecture Soeuf Elbadawi, accompagné du guitariste Laher. Présenté à Paris (Maison des métallos / programme Anticolonialiste !), Tulle (CFA Les Treize vents / Ouvrez les guillemets - Bottom Théâtre) et Limoges (Lycée Léonard Limosin).

18 Juillet 2014 : Soeuf Elbadawi présente Obsessions de Lune Idumbio IV dans le cycle de lectures Ca va, ça va le monde !, coorganisé par RFI ce 18 juillet au Jardin de la rue de Mons au Festival d’Avignon. Une proposition faite avec le Festival des Francophonies en Limousin. La lecture, enregistrée en public sera diffusée le dimanche 17 août, de 22h10 à 23h, sur les antennes de RFI. À partir de cette date, vous pouvez également vivre cette lecture en son, texte et en images sur le site rfi.fr.
Plus d’info : http://www.rfi.fr/culture/20140718-rfi-soeuf-elbadawi-obsessions-lune-idumbio-iv-lecture-avignon/

31e Festival des Francophonies en Limousin : création de Mwezi WaQ., chants de lune et d’espérance, conception, chant, lead Soeuf Elbadawi, avec Laher, Fouad Ahmada Tadjiri,

2015 :
Après la peur spectacle conçu par Sarah Berthiaume, Gilles Poulin-Denis, Armel Roussel auquel Soeuf Elbadawi participe en tant qu’auteur et comédien.
Lecture Festin de mots pour un shungu.

avril 2016 - 11es Nouvelles Zébrures :
Les Enfants de Gaucelm, un banquet du shungu, Soeuf Elbadawi, Jérôme Richer et Marie-Charlotte Biais, avec les élèves d’une classe de 3e Collège Gaulcem Faidit d’Uzerche.
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Autres informations :

Sortie du CD Chants de lune et d’espérance
Mwezi Waq (collectifs d’artistes comoriens)
Le label Buda Musique dédie à l’archipel cette troisième compilation, non pas « ethnique » mais plutôt de reprises acoustiques sobres par des grands noms de la tradition moderne : Sœuf Elbadawi (Grande-Comore), Soubi (Mohéli), Baco "Bob" Chidou (Mayotte), mais aussi de jeunes voix méconnues de la capitale comorienne Moroni tels Kosty, Prince Nico, Nkenke.
+ d’infos et extraits www.akhaba.com

Soeuf Elbadawi a été lauréat d’une bourse d’aide à l’écriture à la Scam pour Comoriens de France, une fabuleuse épopée, œuvre sonore et radiophonique, 2004.

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Liens

http://muzdalifahouse.wordpress.com/

Ile en Ile
Africultures

Entretien Pour tour l’Or des mots, réalisés par Ouï-Dire studio à l’occasion de l’exposition "Pour tout l’or des mots" (Limoges - 7 mars - 7 avril 2011)

Entretien avec Soeuf Elbadawi pour "Moroni Blues"

Manifeste d’utopie pour un mieux-vivre ensemble ou tentative de récit contre la nostalgie des siens ? Un homme raconte sa ville. Une cité insulaire des mers du Sud. Moroni est le principal chef-lieu d’un pays de lune égaré en terre indianocéane…
Langue : français
Durée : 11 minutes 39 secondes
Lieu : Bellac (Théâtre du Cloître)
Participants/comédiens : Entretien réalisé par Marie-Agnès Sevestre
Copyright : Les Francophonies en Limousin / theatre-contemporain.net
Type : Entretien (document vidéo)

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Muzdalifahouse / Chronique de Moha - mars 2014

Un dhikri pour nos morts. La rage entre les dents, de Soeuf Elbadawi, ouvrage paru aux éditions Vents d’Ailleurs, remporte le Prix littéraire des lycéens, apprentis et stagiaires de la formation professionnelle en Ile de France.
La remise de prix a eu lieu vendredi 21 mars 2014, au Salon du livre, à Paris.

Huit auteurs ont été consacrés par l’édition 2013/2014 de ce prix, sur quarante. Aurélien Manya, Emmanuel Lepage, Emilie Frèche, Yves Ravey, Alban Lefranc, Hélène Gestern, Jacques Rebotier ont ainsi vu leurs derniers livres sélectionnés, lus, discutés par l’ensemble des académies de la région Ile de France. A l’instar de Soeuf Elbadawi, qui, lui, a vu son dernier texte être consacré par les lycées et CFA de l’académie de Paris. Une opération portée par les équipes de la Maison des écrivains à Paris, soutenue par un réseau de bibliothécaires, de libraires et de professeurs. Cette année, ils étaient 1200 élèves à voter pour la région entière, à partir d’une sélection de quarante ouvrages, dont le contenu rappelle que les lycéens peuvent des lecteurs exigeants, complètement à l’abri du marché et des tendances à la mode.

Ce sont les lycéens eux-mêmes qui sont venus lui remettre le prix, aux auteurs consacrés, en présence de Julien Dray, vice-président chargé de la Culture au Conseil régional d’Ile de France, et de Henriette Zoughrebi, vice-présidente chargée des lycées et des politiques éducatives, au même Conseil régional. Un dhikri pour nos morts la rage entre les dents avait été adapté au théâtre il y a deux ans par son auteur, joué aux Comores, à la Réunion et en France. Soeuf Elbadawi s’en est aussi inspiré pour nourrir sa dernière proposition scénique, Obsession de lune idumbio Iv, programmée par les Francophonies en Limousin, la Maison de l’Outre-Mer à Nantes et le Festival comoriens des arts contemporains (FACC) à Moroni, dans le cadre de Nouvelles Zébrures, d’Ouvrez les Guillemets (Bottom Théâtre) et de Nantes en francophonie, en mars 2014, et d’une installation intitulée Pays de lune, en mai 2014.

Il va sans dire que la consécration de ce livre est une occasion pour Soeuf Elbadawi de redire qu’entre Anjouan et Mayotte, aux Comores, se meurent des milliers d’innocents, à cause d’un visa inique., surnommé « Visa Balladur », du nom du gouvernement français qui l’a initié en 1994. Ce Visa Balladur est l’une des conséquences les plus tragiques du processus inachevé de décolonisation de l’archipel. Vingt deux résolutions votées par l’Onu condamnent la présence française dans une partie du territoire des Comores. Le droit international parle d’occupation illégale de l’île de Mayotte et de viol d’intégrité territoriale dans un pays souverain. Jusqu’en 1994, la France, respectant l’histoire des Comores et l’étroitesse des liens familiaux entre les habitants de l’archipel, n’interdisait pas la circulation des citoyens entre Mayotte et les trois autres îles de l’archipel. En instaurant le Visa Balladur, elle est arrivée à transformer les Comoriens en « migrants » et en « clandestins », désormais traquées comme des bêtes en mer par une police des frontières, sur « la terre de leurs aïeux », raconte le livre.

Le visa Balladur divise les Comores « en deux rivages ennemis sur un même territoire de vie ». Mayotte française contre l’Union des Comores. Deux états dans un même pays, avec des conséquences tragiques. Lors du naufrage des 300 de Lampedusa, en octobre 2013, Noel Mamère, député français de Gironde, écrivait ceci : « Les larmes de crocodile et la défausse compassionnelle des dirigeants européens ne peuvent masquer la réalité crue et ignoble. Ces 300 morts accusent l’Europe de non-assistance à personnes en danger. Au-delà de la honte, si bien exprimée par le pape François, c’est un crime qui ne dit pas son nom. Pendant que nous assistons à l’insoutenable sur nos écrans de télévision, un même crime se répète chaque jour aux Comores, dans le silence le plus abject. La France de Hollande, barricadée à Mayotte, bafoue le droit international, en continuant d’appliquer dans toute sa dureté les règles découlant du « visa Balladur ». Depuis 1994, plus de 8 000 morts ont ainsi été dénombrés dans le bras de mer de 70 km de large qui sépare l’île d’Anjouan de Mayotte ».

Récit poétique, interrogeant cette histoire en profondeur, le texte de Soeuf Elbadawi, rend surtout hommage aux victimes de ce Visa Balladur. « La plus grosse tragédie qu’ait connu mon peuple à ce jour. A Moroni, nous parlons de près de 20.000 morts, soit près de 2% de la population de l’archipel, qui s’en va sous l’eau. Des morts dont personne, même les autorités comoriennes, ne souhaitent parler. Des cadavres qui embarrassent tout un chacun » confie l’auteur. En consacrant son livre, les lycées et CFA de la région Ile de France prouvent une fois de plus que la poésie ou le trafic des imaginaires, comme le dit Soeuf Elbadawi, reste d’une puissance indiscutable, dès lors qu’il s’agit de se raconter à l’Autre, et de lui tendre la main. « Ces jeunes nous montrent que le dialogue est encore possible entre nos deux rives, et que la France n’est pas toujours ce qu’elle veut bien laisser entrevoir d’elle, sous nos tropiques » Ils ont fait "leur" cette histoire d’un personnage ayant perdu son cousin en mer à cause du Visa Balladur, et, qui voit son pays, de jour en jour, tomber, s’effondrer. Je leur dis encore merci, car ils m’indiquent, par leur choix, que j’ai eu raison de vouloir partager ce récit, et que, tous, nous pouvons nous indigner contre le silence orchestré autour de cette tragédie. Je dis merci aussi à mon éditeur pour sa confiance » résume Soeuf Elbadawi.

Chronique de Moha